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les bouchers

le premier.

Je ne m’y fierais pas, moi, je Je crois capable
De tout ; et s’il apprend que vous êtes coupable,
Gare !…

brûnis.

Gare !… Nous n’avons plus cause d’elle, sinon
Qu’un jour, devant Titou, j’ai prononcé son nom.
Il devint cramoisi, bleu, jaune, vert, orange…
Il marmotta des mots d’une manière étrange…
(Quand je la fréquentais il n’était que marmot.)
Je voulus lui donner le change sur ce mot
Échappé, mais son œil, ardent comme une forge,
Arrêta tout à coup le parler dans ma gorge.
De ce jour, rien, jamais.

le troisième.

De ce jour, rien, jamais. Bonnasse, dirait-on…

brûnis.

Il est, ma foi ! tranquille et doux comme un mouton.

le troisième.

Mais, pardi ! qu’il est beau de le voir à l’ouvrage !
Quel entrain quand il fait son métier ! quelle rage !

brûnis.

Oh ! oui. Pour ça, du jour où je l’eus, je dirai
Que j’en suis on ne peut plus content, vrai de vrai !
Depuis lui, tout va bien et la monnaie abonde.
Voilà six ans : l’ancienne était là, moribonde,
Le vieux Brûnis vivait encor, mais impotent…
J’étais seul, le travail m’encombrait tant et tant…
Titou vint et malgré qu’il me semblât novice
À quinze ans, je le pris de suite à mon service.
Il sourit d’un air fin.