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mieux dans le libre occident : là aussi, on voit fleurir la majorité compacte, et l’opinion libérale, et tout le diable et son train. Mais tout cela, vois-tu, a lieu dans de vastes proportions. On y tue raide, mais on n’y fait pas mourir à petit feu, on n’y tenaille pas une âme libre mesquinement, comme chez nous. Et au besoin on peut se tenir à l’écart. (Remontant vers le fond.) Ah ! Si je savais seulement quelque forêt vierge ou quelque petite île à acheter à bon prix dans les mers du Sud.

Mme STOCKMANN

Oui, mais nos garçons, Thomas ?

LE Dr STOCKMANN, s’arrêtant

Vraiment, Catherine, tu m’étonnes ! Quoi ? Tu aimerais mieux que nos garçons grandissent dans une société comme la nôtre ? Tu as pourtant vu toi-même hier que la moitié de cette population est folle à lier. Et, si l’autre moitié n’a pas perdu l’esprit, c’est que ce sont des brutes qui n’ont point d’esprit à perdre.

Mme STOCKMANN

Oui, mon cher Thomas, mais aussi tu es tellement imprudent dans tes paroles.