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ACTE V

clavage. À la fin, on entendait un cri aigu, celui que pousse l’animal sous le fer du boucher, après quoi l’artiste saluait le public et se retirait. Il y eut là matière à discussion et à critiques savantes, où le blâme alternait avec l’éloge. Quelques-uns trouvaient le grognement trop grêle, d’autres le cri de la fin trop étudié. Sur un point cependant, tout le monde était d’accord : c’est que l’effet, dans son ensemble, était démesurément outré. Voilà ce qui advint au diable pour avoir été maladroit et compté sans son public.

(Il salue et s’éloigne. La foule garde un silence inquiet.)



(La veille de la Pentecôte. Dans les grands bois. Au fond, dans une éclaircie, une cabane. Bois de renne sur le pignon, au-dessus de la porte.

(Peer Gynt rampe par terre, cueillant des oignons.)

PEER GYNT

Une nouvelle étape ! Il faut bien, je le vois,
Tâter un peu de tout avant de faire un choix.
Ce fut là mon destin. Maintenant je m’applique
À sonder les leçons de l’histoire biblique.
De César je me fais Nabuchodonosor.
Vieil enfant, voici donc où finit ton essor :
Dans le sein de ta mère ! Pulvis es, dit le livre.
Se remplir l’estomac, c’est là tout l’art de vivre.
Un peu d’oignon… ce n’est peut-être pas assez
Il faut être inventif et tendre des lacets.