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PEER GYNT

pour dix. Un printemps, tout fut emporté par le torrent. L’homme et sa famille furent sauvés. Sans ressources, sans abri, il se remit au travail et, avant que l’été fût passé, on vit, dans la montagne, un nouveau champ de seigle sur un point mieux protégé que l’autre. Oui, mieux protégé contre l’inondation, mais non contre l’avalanche. Deux ans plus tard, tout était enseveli sous la neige. Tout, sauf le courage de cet homme. Il creusa, déblaya, travailla si bien qu’avant l’hiver sa petite maison était une troisième fois rebâtie. Il avait trois fils, trois gars solides. L’école était loin. Là où finit le chemin communal, il fallait encore prendre un sentier étroit et abrupt, creusé dans la neige durcie. Que faisait-il ? laissant l’aîné grimper comme il pouvait et se contentant de le soutenir, de temps en temps, quand la pente était trop raide, il portait les autres sur son dos. Ainsi s’écoulèrent quelques dures années. Les enfants devinrent des hommes. C’était le moment de leur demander aide pour aide… Mais bah ! trois citoyens aisés ont oublié, aujourd’hui, dans le nouveau monde, leur père norvégien et le chemin de l’école. C’était un homme à courte vue. Par-delà le petit cercle de ceux qui lui tenaient de près, il n’apercevait rien. Les mots puissants qui devraient faire battre tous les cœurs sonnaient à ses oreilles comme de vains grelots. Peuple, patrie, tout ce