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LES SOUTIENS DE LA SOCIÉTÉ

épiciers prennent si volontiers part à tes entreprises ? Crois-tu qu’ils ne se soient pas déjà léché les babines à l’espérance…

BERNICK. — C’est impossible, te dis-je ! Notre petite société a encore assez de bon sens…

HILMAR. — Ici ? Tu es optimiste et tu juges les autres d’après toi-même. Mais moi, qui suis un observateur assez exercé… Il n’y a pas ici une seule personne, excepté nous, une seule personne qui porte dignement le drapeau intellectuel. (Il va au fond du salon.) Oh ! Oh ! les voilà qu’ils viennent !

BERNICK. — Qui ?

HILMAR. — Les deux Américains. (Il regarde.) Mais, qui donc est là avec eux ? Dieu m’assiste !… C’est le capitaine de l’Indian Girl!… Oh ! Oh !

BERNICK. — Que peuvent-ils avoir à lui dire ?

HILMAR. — Cette société doit leur convenir. Il a, sans doute, été marchand d’esclaves ou corsaire. Et quant aux deux autres, qui sait ce qu’ils ont fait ?

BERNICK. — Je te dis que tu es injuste à leur égard, quand tu parles d’eux ainsi.

HILMAR. — Tu es un optimiste !… Nous allons encore les avoir sur le dos, naturellement. Je vais m’esquiver pendant qu’il en est encore temps.

(Il prend la porte de gauche.)

Scène IV

Mlle LONA, HILMAR

LONA (elle arrive par la gauche). — Voyons, Hilmar est-ce moi qui te mets en fuite ?