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LES SOUTIENS DE LA SOCIÉTÉ

JOHANN. — Tu ne me parais pas très heureuse de nous revoir, Martha.

MARTHA. — J’ai attendu si longtemps, Johann, si longtemps !

JOHANN. — Attendre… mon retour ?

MARTHA. — Oui.

JOHANN. — Pourquoi attendais-tu que je revienne ?

MARTHA. — Pour que tu répares le mal que tu as fait.

JOHANN. — Moi ?

MARTHA. — As-tu oublié que, par ta faute, une femme est morte dans la misère et dans la honte ? As-tu oublié que tu as empoisonné toute la jeunesse d’une pauvre enfant ?

JOHANN. — C’est toi, Martha, qui me reproches cela ?… Est-ce que ton frère ne t’a jamais rien… dit ?

MARTHA. — Mon frère ! Pourquoi ?…

JOHANN. — Est ce qu’il n’a jamais… jamais eu an mot d’excuse pour moi ?…

MARTHA. — Johann, tu sais qu’il a, en morale, des principes sévères.

JOHANN. — Hum ! Oui, oui ; je connais les principes sévères de mon vieil ami Richard… Mais, pourtant !… je viens de causer avec lui. Je trouve que, sous ce rapport, il a plus changé que toi.

MARTHA. — Peux-tu dire cela ? Richard a toujours été un honnête homme inflexible.

JOHANN. — Ce n’est pas ce que je veux dire… Laissons cela. Je sais maintenant comme tu me considères. Tu attendais le retour de l’enfant prodigue.

MARTHA. — Écoute, Johann, je vais te dire ce que je pense. (Montrant le jardin.) Vois-tu cette jeune fille qui joue avec Olaf ? C’est Dina. Te rappelles-tu l’incompré-