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THÉATRE

RORLUND. — Qu’est-ce que vous entendez par le beau

DINA. — Je n’ai jamais réfléchi à cela.

RORLUND. — Eh bien, réfléchissez-y. Voyons, qu’en tendez-vous par le beau ?

DINA. — Le beau… c’est… quelque chose de… magnifique et de… bien loin d’ici !

RORLUND. — En vérité, chère Dina, vous me préoccupez fort.

DINA. — Rien que cela ?

RORLUND. — Vous savez bien l’affection infinie que j’ai pour vous.

DINA. — Si j’étais Hilda ou Nella, je ne vous préoccuperais pas si fort ; et cela vous serait égal que l’on s’en aperçut.

RORLUND. — Dina, comment pouvez-vous interpréter si mal la prudence que ;… quand on est, par vocation, un des soutiens moraux de la société, on ne peut être trop circonspect. Oui, si j’étais sûr qu’on ne me prêterait aucun motif indigne… Mais qu’importe, c’est vous qui pouvez et devez venir à mon secours. Dina, quand je dirai, quand les circonstances me permettront de dire : « Voici ma main ; » l’accepterez-vous ? Voudrez-vous être ma femme ? Me promettez-vous cela, Dina ?

DINA. — Oui.

RORLUND. — Merci, merci ! Vous m’êtes si chère, Dina ! Chut, quelqu’un vient. Dina, faites-le pour moi : rejoignez ces dames dans le jardin.

(Elle obéit et va vers la table où l’on a servi le café. Au même moment, Rummel, Sandstad et Wiegeland sortent de la chambre qui est au premier plan à gauche, suivis par Bernick qui tient une liasse de papiers à la main.)