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THÉATRE

le café. Toutes les dames prennent place au dehors et montrent à Dina une affabilité particulière. Cette dernière revient presque aussitôt dans le salon et cherche son ouvrage.) Dina, n’en veux-tu pas ?

DINA. — Non, merci.

(Elle reprend son travail. Madame Bernick et le vicaire échangent quelques mots. Puis ce dernier rentre dans le salon.)

RORLUND (Il feint de chercher quelque chose près de la talile et dit à voix basse.) Dina !

DINA. — Eh bien !

RORLUND. — Pourquoi ne voulez-vous pas venir au jardin ?

DINA. — En apportant le café, je me suis aperçue à la mine de ces dames qu’elles avaient parlé de moi.

RORLUND. — N’avez-vous pas aussi remarqué combien elles se sont montrées aimables à votre égard ?

DINA. — Oui, mais je sais à quoi m’en tenir là-dessus.

RORLUND. — Vous avez une mauvaise tête, Dina.

DINA. — Oui.

RORLUND. — Pourquoi cela ?

DINA. — Je ne saurais pas être autrement.

RORLUND. — Vous pourriez essayer.

DINA. — Non.

RORLUND. — Pourquoi pas ?

DINA (le regardant en face.) — Je suis une de ces personnes moralement corrompues dont on parlait.

RORLUND. — Fi, Dina !

DINA. — Ma mère aussi l’était.

RORLUND. — Qui vous a parlé de cela ?

DINA. — Personne. On ne parle pas avec moi. Pour-