Page:Ibsen - Les Soutiens de la société, L’Union des jeunes, trad. Bertrand et Nevers, 1902.djvu/176

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
164
THÉATRE

cet anniversaire de liberté. Je suis un étranger au milieu de vous…

aslaksen. — Non.

stensgard. — Je vous remercie de cette bonne parole qui m’est un précieux témoignage de sympathie. Cependant, oui, je suis encore un étranger, mais qu’importe ? Mon cœur bat à l’unisson des vôtres pour vos deuils et vos joies, pour vos combats et vos victoires. Et si vous me permettez…

aslaksen. — On vous permet, monsieur l’avocat.

lundestad. — Pas d’interruptions ! Vous n’avez pas là parole.

stensgard. — Vous l’avez encore moins, vous ! Je déclare dissous le comité de la fête. Liberté, un jour de liberté !

des jeunes gens. — Vive la liberté !

stensgard. — On veut vous enlever la liberté de la parole ! On veut vous fermer la bouche ! Repoussez cette tyrannie. Je ne consentirais pas à parler devant une foule asservie. Je tiens par dessus tout à m’exprimer librement, et, sans doute, vous aussi !

la foule (de plus en plus joyeuse). — Hurrah !

stensgard. — Il ne faut pas de ces fêtes infructueuses et banales ; il faut qu’à l’avenir notre fête de mai porte des fruits d’or. Mais c’est l’époque de la semence ; c’est la saison pleine de sève. Le premier juin prochain, il y aura juste deux mois que je me suis établi au milieu de vous ; et que n’ai-je pas déjà vu ici de grand et de petit, de beau et de laid ?

bratsberg. — Docteur, de quoi parle-t-il donc ?