Page:Ibsen - Les Soutiens de la société, L’Union des jeunes, trad. Bertrand et Nevers, 1902.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
159
L’UNION DES JEUNES

hejre. — Oui, mais je n’ai pas comparu.

monsen. — Ah ! Ah ! Vous n’avez pas comparu ?

hejre. — J’avais un prétexte légal. Il me fallait passer le canal et c’était malheureusement dans l’année où Bastian a construit le pont. Vous savez bien ? Vlan, il s’est écroulé dans les ondes !

bastian. — Il a fallu qu’un maudit !…

hejre. — Du sang-froid, jeune homme. Tant de gens ici tendent l’arc jusqu’à ce qu’il se rompe ! Il en est de même pour les arcades des ponts… enfin, je m’entende. Suffit !

monsen. — Ah ! Ah ! Ah ! Oui, suffit ! Buvez seulement. (A Stensgard). Vous entendez ? M. Hejre a le privilège de dire tout ce qu’il lui plait.

hejre. — Le droit d’exprimer librement sa pensée est le seul droit civil auquel j’attache de l’importance.

stensgard. — Il est regrettable que ce droit soit limité par la loi.

hejre. — Hé ! Hé ! L’eau vous vient à la bouche, monsieur l’avocat. Vous pensez déjà qu’on pourrait me faire un bon procès pour injures verbales, hein ? A bas les pattes, très honoré monsieur ! Je suis un vieux praticien !

stensgard. — En fait d’injures ?

hejre. — Excusez-moi, jeune homme ! La mauvaise humeur que vous éprouvez fait honneur à votre cœur, je vous prie d’oublier qu’un vieillard s’est exprimé sans gêne devant vous sur votre ami absent.

stensgard. — Mon ami absent ?

hejre. — Le fils est certainement digne de tout res-