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THÉATRE

madame alving. — Ces livres ? Ce sont des livres que je lis.

le pasteur. — Vous lisez des ouvrages de cette espèce ?

madame alving. — Certainement.

le pasteur. — Sentez-vous que cela vous fasse meilleure ou plus heureuse ?

madame alving. — Il me Semble que cela me rend en quelque sorte plus sûre de moi-même.

le pasteur. — C’est singulier. Comment cela se fait-il ?

madame alving. — Voilà ; je trouve comme une explication, une confirmation de bien des choses que j’ai coutume de penser et de ruminer en moi-même. Car, voyez-vous, pasteur Manders, ce qu’il y a d’étonnant, c’est qu’à vrai dire, on ne rencontre absolument rien de nouveau dans ces livres ; il n’y a là que ce que la plupart des hommes pensent et croient. La seule différence, c’est que la plupart des hommes ne s’en rendent pas compte ou ne veulent pas s’y arrêter.

le pasteur. — Ah, par exemple ! croyez-vous bien sérieusement que la plupart des hommes… ?

madame alving. — Oui, je le crois.

le pasteur. — Mais ce n’est pas dans notre pays, ce n’est pas chez nous ?

madame alving. — Hélas ! Chez nous comme ailleurs.