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hedwige. — Oui, puisque le canard est à moi.

grégoire. — Justement.

hedwige. — Oui, il est à moi, mais papa et grand-père peuvent me l’emprunter aussi souvent qu’ils veulent.

grégoire. — Vraiment. Et qu’est-ce qu’ils en font ?

hedwige. — Oh ! ils s’occupent de lui, ils lui arrangent des choses, et voilà !…

grégoire. — Je comprends. Le canard sauvage a naturellement la première place ici.

hedwige. — Bien sûr ; puisque c’est un véritable oiseau sauvage. Et puis il fait tant de peine, il n’a pas avec qui se tenir, le pauvre petit.

grégoire. — Il n’a pas de famille, lui, comme les lapins…

hedwige. — Non. Les poules aussi,… il y en a tant… elles ont été poussins ensemble ; mais lui, il est séparé de tous les siens. Et puis, il y a une chose extraordinaire, avec le canard sauvage ; personne ne le connaît, et personne ne sait d’où il vient.

grégoire. — Et puis il a été au fond des mers.

hedwige, jette un coup d’œil sur Grégoire et réprime un sourire. — Pourquoi dites-vous « au fond des mers » ?

grégoire. — Comment devrais-je dire autrement ?