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ROSMERSHOLM

tout le secret de la lutte et de la victoire. C’est ta le comble de la sagesse en ce monde. Dixi.

rosmer, d’une voix étouffée. — Je comprends. — En effet, vous partez d’ici plus pauvre que vous n’étiez venu.

brendel, All right ! — Prends donc modèle sur ton vieux maître. Efface tout ce qu’il s’est appliqué à graver en toi. Ne construis pas ta citadelle sur du sable mouvant. Et prends bien garde, mesure bien tes forces, avant de fonder quoi que ce soit sur l’être plein de grâces que je vois ici, adoucissant ton existence.

rébecca. — Est-ce de moi que vous parlez ?

brendel. — Oui, ma séduisante sirène.

rébecca. — Pourquoi ne pourrait-on rien fonder sur moi ?

brendel, faisant un pas vers elle. — Je me suis laissé dire que mon ancien élève avait une cause à faire triompher.

rébecca. — Eh bien ?

brendel. — Il est sûr de la victoire, mais, notez bien, à une condition expresse.

rébecca. — Laquelle ?

brendel, lui prenant doucement le poignet. — Que la femme qui l’aime aille gaîment à la cuisine et se coupe le petit doigt, ce petit doigt rose, tenez, là, à la seconde articulation. Item, que la dite femme aimante, toujours aussi joyeusement, se coupe