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ROSMERSHOLM

l’écarter d’une façon ou d’une autre. Et pourtant je ne pouvais croire que les choses en viendraient là. À chaque pas que je tentais, que je hasardais en avant, j’entendais comme une voix intérieure qui me criait : Tu n’iras pas plus loin ! Pas un pas de plus ! Et néanmoins je ne pouvais pas m’arrêter. Je devais continuer encore, quelques pas seulement. Rien qu’un pas, un seul. Et puis encore un et encore un. Et tout a été consommé ! C’est ainsi que ces choses-là se passent.

(Un court silence.)

rosmer, à Rébecca. — Et maintenant, après cet aveu, qu’adviendra-t-il de toi ?

rébecca. — Peu importe, cela n’a pas grande importance.

kroll. — Pas un mot qui trahisse du repentir. N’en éprouveriez-vous pas ?

rébecca, froidement. — Excusez, monsieur le recteur, cela ne regarde personne, c’est une chose que je réglerai avec moi-même.

kroll, à Rosmer. — Et c’est avec cette femme que tu habites sous le même toit, dans une étroite intimité. (Regardant les portraits.) Oh ! si les morts pouvaient voir ce qui se passe ici !

rosmer. — Rentres-tu en ville ?

kroll, prenant son chapeau. — Je voudrais y être déjà.