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ROSMERSHOLM

rosmer. — De Mlle West également ?

mortensgaard. — Non, monsieur le pasteur.

rosmer. — Mais alors, de qui ? de qui ?

mortensgaard. — De feu madame Rosmer.

rosmer. — De ma femme ? vous avez reçu une lettre de ma femme !

mortensgaard. — Oui, j’en ai reçu une.

rosmer. — Quand cela ?

mortensgaard. — Dans les derniers temps de sa vie ; il y a un an et demi environ. C’est de cette lettre-là que je parle : elle est vraiment extraordinaire.

rosmer. — Vous savez bien qu’à cette époque ma femme était atteinte de maladie mentale.

mortensgaard. — Je sais que beaucoup de personnes le croyaient, mais sa lettre ne l’indique nullement, à mon avis. En disant que la lettre est extraordinaire, je l’entends autrement.

rosmer. Mais qu’a-t-elle bien pu trouver à vous écrire, ma pauvre femme ?

mortensgaard. — J’ai la lettre chez moi. Elle commence à peu près ainsi : Elle vit, dit-elle, dans des transes continuelles, à cause de toutes les méchantes gens dont la contrée est pleine. Ces gens-là ne songeraient qu’à vous nuire et à vous faire tout le mal possible.

rosmer. — À moi ?

mortensgaard. — Oui, d’après elle. Mais voici