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gina, entrant. — Ouf ! Ekdal, je crois que grand-père est encore tout seul au grenier à tirer des coups de fusil.

hialmar. — Je vais voir…

grégoire, saisi, avec joie. — Attends un peu. Sais-tu ce que c’est ?

hialmar. — Je crois bien.

grégoire. — Non, tu ne le sais pas. Mais je le sais, moi. C’est la preuve.

hialmar. — Quelle preuve ?

grégoire. — Un sacrifice d’enfant : elle a persuadé à ton père de tuer le canard sauvage.

hialmar. — Tuer le canard sauvage ?

gina. — Pense donc !

hialmar. — À quoi bon ?

grégoire. — Elle a voulu te sacrifier ce qu’elle avait de plus précieux. Elle croit t’obliger, de cette façon, à lui rendre ton amour.

hialmar, mollement, d’une voix émue. — Oh, cette enfant !

gina. — Ce qu’elle peut imaginer !

grégoire. — Elle a voulu reconquérir ton amour. Hialmar, voilà tout. Elle ne croyait pas pouvoir vivre sans cela.

gina, retenant ses larmes. — Tu vois bien, Ekdal.

hialmar. — Gina ! Où est-elle ?

gina, larmoyant. — Pauvre petite, pour sûr qu’elle sera toute seule à la cuisine.