Page:Ibsen - Le Canard sauvage, Rosmersholm, trad. Prozor, 1893.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que je sois grande et raisonnable. Je vois ce que c’est. Je ne suis peut-être pas l’enfant de papa.

grégoire, inquiet. — Comment serait-ce possible ?

hedwige. — Maman m’aura peut-être trouvée et papa l’aura appris tout à l’heure. J’ai lu de ces choses dans les livres.

grégoire. — Eh bien ! si c’était le cas ?

hedwige. — Il me semble qu’il pourrait m’aimer tout de même, autant, si ce n’est davantage. Le canard sauvage aussi, nous l’avons reçu en cadeau et je l’aime tant malgré ça.

grégoire, saisissant le joint. — C’est ça, Hedwige, le canard, parlons un peu du canard.

hedwige. — Pauvre canard ! Il ne peut plus le voir non plus. Pensez donc : il a songé à lui tordre le cou.

grégoire. — Baste ! Il n’en fera rien.

hedwige. — Non, mais il en a parlé. C’est si vilain à papa, d’avoir dit ça. Vous savez : je récite tous les soirs une prière pour le canard, afin qu’il soit préservé de la mort et du mal.

grégoire, la regardant. — Vous avez l’habitude de faire votre prière le soir ?

hedwige. — Mais, oui.

grégoire. — Qui vous a enseigné cela ?

hedwige. — Personne. Papa a été si malade une