pas vécu depuis, torturée de remords et d’angoisses ?
gina. — Ah ! mon cher Ekdal, j’ai eu, ma foi, bien assez à faire à penser à la maison et à la vie de tous les jours.
hialmar. — Et jamais tu ne jettes un regard en arrière, sur les fautes de ton passé ?
gina. — Non ; je les avais presque oubliées ces vieilles histoires, tu sais.
hialmar. — Oh, cette insensibilité, ce calme de brute ! Il y a là quelque chose qui m’indigne. Pas même de remords !
gina. — Dis-donc, Ekdal, que crois tu que tu serais devenu, si tu n’avais pas trouvé une femme comme moi ?
hialmar. — Une !…
gina. — Oui, c’est que j’ai toujours été, comme qui dirait, plus débrouillarde que toi. C’est vrai aussi, que j’ai une couple d’années de plus.
hialmar. — Ce que je serais devenu !
gina. — C’est que tu prenais toute espèce de mauvais chemins dans le temps où tu m’as rencontrée. Tu ne peux pas nier ça.
hialmar. — Tu appelles cela de mauvais chemins ! Oh ! tu ne sais pas ce qui ce passe dans le cœur d’un homme livré au chagrin et au désespoir. Et surtout un homme à tempérament de feu comme moi !