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NOTICE
SUR LE « CANARD SAUVAGE »




Dans aucune œuvre d’Ibsen le caractère spécial de son génie ne se dessine aussi nettement que dans le Canard sauvage. Je ne veux pas dire que ce soit là l’œuvre capitale du grand dramaturge qu’on appelle d’ordinaire l’auteur des Revenants. Les jours où la figure d’Oswald, celle de sa mère et toute cette vision du nord, d’une si effrayante lucidité, lui est apparue, au soleil de juillet, sur les bords du golfe de Naples, ne sont-ils pas les plus importants de sa vie intellectuelle ? Il le penserait lui-même que je n’en serais pas surpris. Mais ce qui ne m’étonnerait pas davantage, c’est qu’il eût dérogé en cette occasion à son système de travail habituel, qui n’est pas de s’abandonner à l’inspiration, d’improviser ses œuvres et de les tracer d’une haleine.

À cet égard, les renseignements ne nous manquent pas. En Allemagne comme en Scandinavie, ce n’est pas seulement l’œuvre d’Ibsen, c’est encore sa physionomie qui intéresse le public.

Ibsen nous offre, en effet, en plein xixe siècle, le type d’un de ces laborieux d’âme et d’esprit dont la figure séduit quiconque sonde le passé pour y retrouver le secret de la grande production intellectuelle. Depuis longtemps, cette saine intelligence s’est as-