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verte… on ne régie pas cela à sa guise. Cela dépend de l’inspiration, d’une suggestion. Il est presque impossible de dire d’avance à quelle époque elle arrive.

grégoire. — Mais cela avance, cependant ?

hialmar. — Naturellement, cela avance. Il ne se passe pas un jour que je ne travaille à la découverte : elle me remplit tout entier. Quotidiennement, après le repas, je m’enferme au salon, où je puis me recueillir en silence. Seulement il ne faut pas me presser, cela ne sert à rien. C’est aussi l’avis de Relling.

grégoire. — Ne crains-tu pas qu’en t’occupant ainsi de ce grenier, tu ne te laisses distraire, enlever à tes idées ?

hialmar. — Non, non, non ; tout au contraire. Ne dis donc pas cela. Je ne puis aller et venir toute la journée, sous l’obsession constante d’une même idée. L’inspiration, vois-tu, le trait de lumière, vient tout de même quand il doit venir.

grégoire. — Tu sais, mon cher Hialmar, qu’à mon avis, il y a en toi quelque chose du canard sauvage.

hialmar. — Du canard sauvage ? Comment l’entends-tu ?

grégoire. — Tu as plongé jusqu’au fond et tu te tiens aux varechs.

hialmar. — Tu penses peut-être à ce coup pres-