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CATILINA
CATILINA

Ma douce et tendre Aurélia,
Pourquoi assombrirais-je ta vie
En ce faisant partager mon chagrin ?
Par moi tu as déjà trop souffert,
Et, désormais, j’entends garder pour moi seul
Tout ce que le destin me réserve de mauvais.
N’est-ce pas assez malheureux
De posséder une âme énergique,
Envieuse de faire une œuvre puissante,
Alors que la pauvreté rend le succès impossible ?
Faudra-t-il donc que toi aussi
Tu boives à la coupe amère de mon destin ?

AURELIA

Consoler est le lot de l’épouse.
Si à elle il n’est pas permis comme à toi
De former des rêves ambitieux,
Quand l’époux lutte pour l’idéal,
Et que sa récompense
Est faite de désillusions et de chagrins,
La voix de l’épouse doit se faire tendre et compatissante.
Elle doit doucement endormir sa souffrance,
Afin qu’il comprenne qu’une existence paisible et calme