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446 PROLEGOMENES

découlait des bouches souriantes des fleurs. J étais allé de bon matin visiter la

prairie ; les gouttes d'humidité s'y voyaient répandues ^ comme des perles

. échappées- du collier qui pare le cou d'une jeune fdle. L'eau fournie par les

". 'ii8. norias^ coulait abondamment, serpentait partout à l'instar des dragons, entou- rant d'un cercle chaque arbre à fruit et cernant comme un anneau le. pied de chaque arbrisseau couronné de rameaux. Tout cela formait un bracelet autour du jardin. La rosée déchirait de ses mains les voiles dont s'entouraient les boutons de fleurs, et les zéphyrs en emportaient le parfum. Le teint noir des nuages^ formait des taches sur l'ivoire du jour; le zéphyr traînait sa robe ( sur les fleurs) en répandant une douce odeur. Je vis (alors) sur une branche**, au milieu des feuilles, une tourterelle dont les gouttes de rosée avaient humecté les plumes, et qui gémissait comme un amant éperdu d'amour et loin de son pays. Elle s'était enveloppée de son plumage^ neuf comme d'un manteau, mais elle avait le bcc^ et les pattes teintes en rouge. Elle portait autour du cou un col- lier de pierres précieuses, et se tenait perchée au milieu des rameaux, (triste) comme un amant affligé, ayant pour oreiller une de ses ailes et pour cou- verture l'autre '. Elle se plaignait de l'ardeur qui consumait son cœnr, et, dans sa (douleur), elle serrait son bec contre sa poitrine et poussait des cris. Je lui dis : Colombe, tu empêches mes yeux de goûter le sommeil; dis-moi, ne

P.iig. cesseras-tu pas de le lamenter et de verser des larmes? Elle répondit : J'ai pleuré au point d'épuiser mes larmes, et je n'en ai plus à verser. Pendant toute ma vie je me lamenterai '"de la perte d'un de mes petits qui s'est envolé de chez moi pour ne plus revenir ; cela m'a habituée au chagrin et aux larmes depuis'^ le temps de Noë. Voilà, disais-je, comment on remplit son devoir; voilà la fidélité. (Elle répondit) : Voyez mes paupières devenues (rouges) comme des blessuresl Mais, parmi vous autres hommes, celui qui est dans l'affliction dit au bout d'une année : Cela m'ennuie de pleurer et de me lamenter. Je lui dis : Colombe, si tu étais plongée dans l'océan des soulTrances, tu pleurerais'^ sur moi, en ver- sant des torrents de larmes, et, s'il y avait dans ton cœur ce (feu brûlant) qui

' Pour (jv^^t, lisez ^^lyiî. ' Pour o-oJU|, lisez i_>;^-àiul.

' Pour syjÂ/^ lisez sÂ*JT ' Pourjjy <J , lisez jJjJ ^^.

' Le mot noria (en arabe naao^^a■o^»cU) ' Variantes fausses Ur, «Uj, slàj.

sert à désigner la roue hydraulique, ou roue à chapelets. Dans la province d'Alger on donne ordinairement à ces machines le nom de doulah.

' Littéral. « les seins des robes. » Il faut lire tj^r^^-

' Litléral. « le musc des nuages. »

��" Lisez tiyJij i>".jj'. '" Lisez |ij.j cl 5-yj- " Tous les manuscrits portent J, qui est certainement la leçon du texte original. " Pour J.£, lisez ijy*.

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��k^est

��pou

��r cj-^ d'à

��près

��une licence de la langue vulgaire.

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