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D'IBN KHALDOUN.

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��trompe les espérances de l'amant, au point que le cœur de celui-ci est consumé par l'ardeur de la passion, elle est l'objet que l'âme estime le plus : aimer sa maîtresse n'est pas un péché. Ses ordres agissent sur tous les cœurs, sur tous les seins dont elle a fait le tourment, et y trouvent une prompte obéissance. Ses regards dominent sur l'âme avec une puissance absolue. Jamais, pendant que ses amants poussaient leurs derniers soupirs, jamais elle n'a pensé à cet Être qui venge les opprimés en punissant les oppresseurs et qui donne aux âmes ver- tueuses et aux âmes criminelles la rétribution qui leur est due. Qu'a-t-il donc, mon cœur? Chaque fois que le zéphyr fait sentir son haleine*, une nouvelle P- -io^. passion vient s'y installerl La tablette qui porte inscrite la destinée de l'amant renferme ces paroles de Dieu ^ : Certes le tourment que j'infligerai sera sévère. (Cette belle) a attiré sur moi les soucis et les maux, de sorte que, entouré de chagrin, j'ai éprouvé des souffrances atroces. (La personne) qui a porté le trouble dans' mon cœur et qui l'a enflammé, ainsi que le feu embrase un faisceau de bois des- séché, ne m'a rien laissé de la vie, excepté un dernier soupir* qui persiste encore, de même que les dernières lueurs du jour persistent après l'invasion des ténè- bres. Résigne-toi, mon âme, aux décrets du destin; emploie le moment actuel à opérer ma conversion et à tourner mon cœur vers Dieu. Ne pense plus aux jours que j'ai passés à reprocher (aux belles leur cruauté) ou à jouir de faveurs qui sont maintenant finies pour moi. Adresse la parole au prince favorisé de Dieu, à celui qui a reçu par inspiration cette grâce qui est annoncée dans le livre saint, à cet homme généreux qui est parvenu au faîte (de la gloire) et qui a grandi (dans les honneurs), au lion du château, au soleil de l'assemblée, à celui sur qui l'aide divine est descendue ainsi que descendirent les révélations P. io4. que l'esprit de la Sainteté porta (à notre Prophète) ^.

On voit- aux odes des Orientaux que ce genre de composition leur coûtait un travail d'esprit pénible. Une des meilleures qu'ils aient pro- duites est celle qui a pour auteur Ibn Sena '1-Molk et qui est aussi bien connue en Occident qu'en Orient. Elle commence ainsi :

Ma bien-aimée, ayant enlevé le voile de lumière qui couvrait son visage, te

��' Pour c>I*. lisez o-»*-

  • Coran, soiir. xiv, vers. 7.

' Pour ^^, lisez j . ' Pour LojJl, lisez L»jJl. ' Ibn Khaldoun a supprimé ici dix dou- bles héraisiiches formant la fin du poème

��et renfermant l'éloge du prince. On les trouvera dans la Vie de Lisan ed-Dîn, com- posée par El-Maccari.

  • Le poète Hibet Allah Ibn Djafer Sena

'1-Molk , natif d'Egypte, mourut au Caire, l'an 608 (121 1-1212 de J. C).

55.

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