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426 PROLÉGOMÈNES

L'Aveugle de Tudèle s'avança pour faire entendre la sienne, qui était la célèbre ode dont les premiers mots sont :

En riant, elle montre des perles; en se dévoilant, elle laisse voir une lune; le monde est trop étroit pour la contenir, et cependant elle se trouve renfermée dans mon cœur^

A peine eut-il prononcé ces lignes qu'lbn Baki déchira sa propre ode, et les autres poètes suivirent son exemple,

El-Aalem el-Batalyauci rapporte qu'il avait entendu dire à Ibn Zohr^ : « Les odes d'aucun poëte n'ont jamais excité ma jalousie, à l'exception d'une, composée par Ibn Baki. Quand je l'entendis pour la première fois, je ressentis vivement cette passion. En voici le com- mencement :

Ne vois-tu pas Ahmad, dans la hauteur de sa gloire, sans rival ! L'Occident l'a produit; montre-moi son pareil, pays de l'Orient! »

Dans le siècle où ces deux poètes florissaient, il en parut un autre nommé Abou Bekr el-Abiad', dont les odes se distinguaient par un p. 393. style simple et naturel. Un autre de leurs contemporains fut le phi- losophe Abou Bekr Ibn Baddja*, auteur des airs [telhîn] qui sont si bien connus. Il y a une anecdote assez répandue que je veux rap- porter ici : Ibn Baddja, se trouvant à une partie (de plaisir) chez son patron, Ibn Tîfelouît^, seigneur de Saragosse, remit à une des chan- teuses appartenant à ce prince une ode qui commençait ainsi :

��' Voici la transcription de ce morceau :

Dhabek an djoman, safer an bedri, Dhac anho 'z-zeman , oua hawabo sadri.

" Ce personnage portait le surnom d'Abou '1-Rballab, et appartenait proba- blement à la même famille que le célèbre médecin Avenzoar (/in ZoAr).

Ce poëte se nommait Abou Bekr Mo- hammed Ibn elAnsari el-Abiad. Selon El- Maccari, il fut mis à mort par un certain Ez-Zobeïr, émir de Cordoue, qu'il avait at- taqué dans ses vers.

�� Le célèbre philosophe Ibn Baddja [Avenpace] s'était distingué aussi comme poëte. Il mourut à Fez, l'an 533 (ii38- 1 139 de J. C).

' Ce sobriquet signifie a fils de la pou- liclie. » C'est un mol arabe berbérisé. Celui à qui on l'avait donné était beau-frère du roi almoravide Ali Ibn Youçof et se nom- mait Abou Bekr Ibn Ibrahim. (Voy.l'Hijt. des musulmans d'Espagne de M. Dozy, t. IV, p. 262.)

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