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Khafadja ', poëte de l'Espagne orientale; ils trouvaient que les pen- sées V étaient trop nombreuses et qu'elles venaient se heurter et s'ac- P. 339. cumuler dans chaque vers. Ils reprochaient de même à El-Motenebbi et à (Abou '1-Ala) el-Maarri de n'avoir pas composé leurs poëmes d'après les formes obligées de la poésie arabe, et ils regardaient ces pièces comme des discours versifiés qui étaient loin d'atteindre le niveau de la poésie. Mais ce qui décide de cela, c'est le goût. Que le poëte évite les termes rustiques- et bas, ainsi que les mots em- ployés par les gens du peuple et qui sont usés à force de servir; l'em- •ploi de termes de cette espèce rabaisse le discours du rang qu'il doit tenir comme l'expression nette et élégante de la pensée. Il rejettera aussi les idées banales, parce qu'elles avilissent le discours et le rendent si trivial qu'il devient insignifiant; il ne dira donc pas que le feu est chaud ou que le ciel est au-dessus de nous. Plus un discours se rapproche de la trivialité, plus il s'éloigne du beau style; ce sont là, en effet, les deux extrêmes opposés. Voilà pourquoi les cantiques renfermant les louanges du Seigneur ou du Prophète^ sont rarement bons : pour en composer, il faudrait des hommes d'un talent supé- rieur, mais ceux-ci sont bien rares, et le sujet est très-difficile à traiter, tant les idées en sont devenues communes et vulgaires. .Si le poëte, après s'être conformé à toutes ces prescriptions, trouve que sa faculté poétique reste encore rebelle, il doit l'exercer beaucoup et l'habituer à agir, car l'esprit est comme le pis (d'une vache) : quand on le Irait, il fournit abondamment, et quand on le laisse, il se tarit. Je dirai en terminant que tout ce qui se rapporte à cet art et à la manière de l'apprendre est exposé dans VOmda d'Ibn Rechik, traité dont nous nous sommes efforcé de donner ici le sommaire. Celui qui

��' Ce poëte espagnol mourul en 533 Kliallikan et Maccari le nomment Abou

( 1 1 39 de J . C. ). Le recueil de ses ouv rages Ishac A hmcd.

se trouve dans la Bibliollièque impériale * Le mol haouchi { ^j^^^) est africain et

et dans celle de l'Escuriai. Les tnanus- dérive de /laouc/i « ferme, métairie.» crils C et D et l'édition de Boulac lui ^ Je lis cjiLj^aàJI^, avec jeinanuscrit C

donnent le surnom (VAbou Bekr, mais Ibn et l'édition de Boulac.

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