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D'IBN KHALDOUN. 373

sées d'après les exigences de l'analogie, mais des phrases dont l'em- ploi était déjà établi chez ce peuple.

Ces considérations nous amènent à dire que l'existence de ces modèles (ou tournures) dans l'esprit a pour cause l'habitude d'ap- prendre par cœur (beaucoup) de poèmes et de discours composés par les (anciens) Arabes, et que la prose, ainsi que la poésie, a des tournures qui lui sont propres. En elVet, le discours, chez les Arabes, se présentait sous l'une ou sous l'autre de ces formes et paraissait dans chacune avec un caractère parfaitement distinct. La poésie se composait de morceaux (ou vers) soumis à une même mesure, terminés par une même rime et présentant chacun un sens complet. Dans la prose (et surtout dans la prose poétique), on visait à établir un parallélisme entre les phrases et à leur donner une res- semblance mutuelle; tantôt on les terminait par des rimes, et tantôt on les laissait courir sans enti-ave.

En ce qui regarde le langage des Arabes, les tournures propres à chacune de ces deux formes sont bien connues, et celles dont ce P. 33a. peuple a fait usage sont les mêmes que l'auteur a employées en éta- blissant le texte de ce livre. Pour les connaître, il faut avoir gravé dans sa mémoire (assez de passages de) la langue (parlée par les anciens Arabes) pour qu'on ait ' à sa disposition beaucoup de tour- nures (ou locutions) particulières et individuelles dont on puisse abstraire une tournure générale et universelle à laquelle on se con- formera* en composant un ouvrage; de même que l'ouvrier en pisé ne doit pas s'écarter de son moule, ni le tisserand de son métier. L'art de composer est donc tout à fait distinct de ceux vers lesquels le grammairien, le rhétoricien et le prosodisle dirigent leur attention. Je dois toutefois avouer qu'une des conditions imposées a un au- teur est de respecter les règles des sciences que je viens d'indi- quer; sans cela, son ouvrage ne serait pas parfait. Un discours (ou une composition littéraire) qui réunit toutes ces qualités se distingue

' Le mot «J est de trop. ' Il faut lire ji^jc.

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