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��PROLEGOMENES

��éprouva, et le langage dont se sert toute la race (actuelle des Arabes) en dilFère beaucoup. Ce dernier est une autre langue formée, comme nous l'avons dit précédemment, par le mélange d'un idiome étranger. Toutefois, puisque les langues sont des facultés d'acquisition, on peut les acquérir par l'étude \ connue toutes les autres facultés de la même nature. Quiconque veut se procurer cette faculté et désire s'en 1'. 3o8. mettre en possession doit, pour apprendre la (langue de Moder), s'y prendre de la manière suivante. Il gravera dans sa mémoire les dis- cours anciens provenant des Arabes modérites et composés dans le style et avec les tournures qui leur étaient propres; le Coran, par exemple, les traditions, les paroles des premiers musulmans, les com- positions en prose rimée et en vers que nous ont laissées les plus cé- lèbres d'entre les Arabes, en y ajoutant encore les expressions propres aux mowalled'^, et tout cela sur les diverses matières dont ils se sont occupés; de sorte qu'à force d'avoir imprimé dans sa mémoire une bonne provision de morceaux de prose et de poésie composés dans leur langue, il devient comme im homme né et élevé parmi eux et qui aurait appris d'eux la manière d'exprimer ses pensées. i\|)rès cela, il doit s'exercer à énoncer ses idées dans les termes dont ils se seraient servis eux-mêmes, et à coordonner de la même façon qu'eux les élé- ments du discours, et, (pour cela, il fera usage) des idiotismes et des formes de phrase offerts par les morceaux qu'il a appris et retenus par cœur. C'est par ce travail de la mémoire, joint à la pratique, qu'il finira par se rendre maître de cette faculté; et elle sera d'autant plus solide et plus forte chez lui, qu'il multipliera davantage ce travail et cet exercice. Ajoutons que, pour réussir à cela, il faut encore qu'il ait d'heureuses dispositions naturelles, qu'il apprécie bien la marche

��' PourL^..^i>j, lisez l.^.JUj', leçon des manuscrits A , C et D et de l'édition de Boulnc.

' Par le terme mowalled (métis) , les lit- térateurs veulent désigner celte classe de poètes qui suivit immédiatement celle des poètes antéislamites et précéda celle dont

��l'éducation s'était faite dans les villes. Je pense fjue notre auteur emploie ici ce ternie pour désigner les Arabes qui vécu- rent à l'époque de transition, après que ce peuple eut abandonné ses déserts pour adopter les usages de la vie sédentaire.

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