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pensées est perdu aujourd'hui et que la langue arabe est dégénérée, et cela uniquement à cause du ' h r. .cernent qui est survenu par rapport aux désinences dont l'emplOi régulier et systématique fait l'objet capital de leurs études. C'est là une assertion que leur a sug- gérée la partialité (pour leur propre occupation), et une idée qui s'est emparée de leur esprit à cause de leurs vues très- bornées. Autrement ne voyons-nous pas que les mots arabes, dans leur grande majorité, conservent encore aujourd'hui les significations qui y avaient été attachées lors de leur institution primitive; qu'on trouve encore dans le langage des Arabes la même capacité d'exprimer ce que l'on veut dire; que les différences qu'on observait précédemment dans cette langue, relativement au plus ou moins de clarté de l'expression, s'y rencontrent encore aujourd'hui; enfin que toutes les formes et toutes les variétés du discours, soit en prose, soit en poésie, se retrouvent p. 3oi. encore dans leurs entretiens? On rencontre parmi eux des orateurs qui exercent le pouvoir de féloquence dans leurs réunions et leurs assemblées, et des poètes habiles dans l'emploi qu'ils savent faire des diverses formes du langage. Un goût sain et un esprit naturelle- ment droit, voilà tout ce qu'il faut pour reconnaître cette vérité. Il ne manque donc au langage de ces Arabes, pour être tout à fait semblable à celui des livres, que l'usage des voyelles à la fin des mots, usage qui, dans l'idiome de Moder, était assujetti à une loi uniforme et à une marche fixe et constante. C'est ce qu'on nomme syntaxe désinentiellc et qui forme une des lois de ce langage.

On ne s'est attaché à étudier l'idiome de Moder qu'à l'époque où il s'altérait par le njélange des Arabes avec les peuples étrangers; ce qui eut lieu quand ceux-là eurent conquis les royaumes de l'Irac, de la Syrie, de l'Egypte et du Maghreb; la faculté acquise (par l'ha- bitude) de parler cette langue subit alors un tel changement qu'il devint un autre idiome. Or le Coran fut envoyé du ciel dans le lan- gage de Moder, les traditions venues du Prophète sont dans ce même idiome, et on sait que ces deux recueils (le Coran et la Sonna) servent de fondement à la religion et à la communaité musulmane.

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