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termes qui devaient altérer son caractère et qu'elle recevait facile- ment, tant elle avait l'habitude d'obéir à l'audition, p. 381. Les hommes prévoyants' parmi les Arabes commencèrent alors à craindre que, dans la suite des temps '^, cette faculté ne se perdît tout à fait et que l'accès du Coran et de la Sonna ne fût fermé à toutes les intelligences. Voulant prévenir ce danger, ils tirèrent des ex- pressions usitées dans leur langue quelques règles qu'on devait ap- pliquer d'une manière absolue à (la conduite de) cette faculté, et qui ressemblaient à des universaux ou principes généraux. Ils examinèrent, au moyen de ces règles, toutes les formes du discours, afin de pou- voir les classer selon leurs analogies. Le régissant devait se placer dans la catégorie du merfouâ (ce qui est au nominatif ou au mode in- dicatif), ainsi que le sujet de la proposition, et le régime (du verbe) devait être mis dans celle du mensoub (ce qui est à l'accusatif). S'étant ensuite aperçus que la signification des mots se modifiait selon les changements subis par ces motions (ou voyelles finales, servant à marquer les cas et les modes), ils s'accordèrent à désigner (les règles de) ces changements par le nom cYeïrab (arabisation, syntaxe des dé- sinences), et à donner le nom d'aamel (régissants) aux mots qui les effectuaient. De là dérivait un corps de doctrine qu'ils acceptèrent d'un commun accord et dont ils étaient les seuls dépositaires. Ils la mirent ensuite par écrit et en formèrent un art qui leur appartenait et qu'ils désignèrent par le terme nahou (voie, grammaire).

Celui qui, le premier, écrivit un ouvrage sur cette matière, fut Abou '1-Asoued ed-Douéli ', de la tribu de Kinana. Il le fit, dit-on, sur l'invilation d'Ali (le khalife), qui, ayant remarqué que la faculté de parier correctement commençait à s'altérer, lui avait ordonné de faire quelque chose pour l'empêcher. Abou '1-Asoued eut recours à l'étabUssemcnt de quelques règles qu'on pouvait se rappeler facile-

' Je lis .•j-l*. sans d'Ali, mourut l'an 69 (688-689 de

  • Lisez Oyojy J. C.). Voyez Dict. biogr. d'ibn Khallikan,

' Abou 'l-Asoued Dhalem Ibn Amr vol. I, p. 662. L'auteur y parle des travaux

ed-Douéli, natif de Basra el un des parti- d'Abou '1-Asoued sur la grammaire.

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