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D'IBN KHALDOLN. 305

gère, tombèrent dans l'oubli et n'obtinrent pas plus de considération qu'une ruine abandonnée, qu'un nuage de poussière chassé par le vent, et toutes les sciences se trouvèrent exposées dans le langage des Arabes et consignées dans des recueils dont l'écriture était celle de ce peuple. Il fallait donc que les personnes engagées dans des études scientifiques connussent la signification des mots appartenant à leur langue, non-seulement des mots articulés, mais des mots écrits; car elles devaient se passer des traités rédigés en d'autres langues, vu que ces volumes avaient péri, faute de soins.

Nous avons déjà fait observer que parler un langage quelconque est une faculté acquise par la langue, de même qu'écrire est un acte dont la faculté appartient à la main. Donc, si un homme a contracté dans sa jeunesse l'habitude de parler une autre langue que l'arabe, P. 377- jamais il ne parviendra à bien énoncer ses idées en arabe. C'est un fait que nous avons laissé entrevoir en démontrant qu'une personne, devenue très-habile dans la pratique d'un premier art qu'elle aurait appris, ne parvient presque jamais à se distinguer dans un second; cette proposition me paraît évidente. L'étranger, qui n'a qu'une con- naissance imparfaite de l'arabe et de la siguificalion des mots aiti- culés ou écrits qui appartiennent à cette langue, ne saurait recon- naître d'une manière parfaite les idées que ces mots représentent, ainsi que nous venons de le dire; à moins toutefois que l'habitude de parler sa propre langue ne soit pas devenue une facuhé persis- tante à l'époque où il veut s'appliquer à l'étude de l'arabe. C'est ainsi qu'en Perse les enfants qu'on élève dans la société d'Arabes, et dont l'esprit n'a pas encore subi l'influence de leur langue maternelle, parviennent à bien parler l'arabe. En ces cas, c'est la langue arabe qu'on peut considérer comme la première qu'ils ont apprise, et ils n'auront pas de difficulté à comprendre les idées qu'ils y trouvent énoncées, 11 en est de même des personnes ' qui ont appris l'écriture usitée dans leur pays avant de s'occuper de l'écriture arabe. Aussi

' L'auteur a voulu dire : •' Les mêmes observations s'appliquent aux personnes. » Prolégomènes. — m. 39

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