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ce corps comme une âme privée de forme. Cela résulte du fait qu'é- tant entré dans le corps, il est tout à fait sans pesanteur, ainsi que je vous le montrerai, s'il plaît à Dieu. Vous devez savoir aussi qu'il est plus facile de mêler le délié avec le délié que l'épais avec l'épais. Je désire vous indiquer par ces mots l'accord qui existe entre les es- prits et les corps; car les choses s'unissent à raison de leur accord mutuel. Je vous' dis cela pour vous apprendre que (l'emploi de) l'œuvre à l'égard des natures déliées et spirituelles est plus conve- nable et plus facile que son emploi à l'égard des (choses) grossières et corporelles. Notre intelligence conçoit très-bien que les pierres offrent plus de résistance au feu que les esprits. Vous n'avez qu'à observer l'or, le fer et le cuivre; ils résistent mieux au feu que le soufre, le mercure et les autres esprits. Je dis maintenant que les corps ont commencé par être des esprits, et qu'ils ne furent convertis en corps doués de cohérence et de densité qu'après avoir éprouvé la chaleur de la nature plastique [kiân). Le feu ne peut pas alors les consumer, à cause de leur extrême densité et de leur cohésion. Quand le feu est très-intense, il les convertit en esprits, ainsi qu'ils l'avaient été lors de leur première formation; mais les esprits déliés, étant exposés au feu, ne peuvent pas y résister et se volatilisent. 11 vous faut maintenant connaître ce que font les corps et ce que font les esprits dans leurs états respectifs'^; c'est là la chose la plus importante que vous puissiez apprendre. Aussi je vous dirai que les esprits se volatihsent et se consument à cause de leur inllammabilité et de leur ténuité. Ils s'en- flamment à cause de leur grande hunùdité et parce que le feu s'at- P. 198. tache à l'humidité aussitôt qu'il la sent, et cela pour la raison qu'elle lui ressemble par sa nature aérienne. Le feu continue à s'en nourrir jusqu'à qu'il n'en laisse plus rien. Cela a lieu aussi pour les corps lorsqu'ils sont assez peu compactes pour se volatiliser par l'application du feu. Us ne .s'enflamment pas, par la raison qu'ils sont composés de terre et d'eau, (matières) qui résistent au feu parce que leur por-

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de Boulac el les manuscriU C et D. nuscrits C el D et l'édition de Boulac.

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