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D'IBN KHALDOUN. 169

fut pas, comme chez les philosophes, une tentative pour arriver à la découverte de la vérité et pour obtenir, au moyen de la démonstra- tion, la connaissance de ce qui était ignoré jusqu'alors. Les scoias- tiques recherchaient des preuves intellectuelles dans le but de con- firmer la vérité des dogmes, de justifier les opinions des premiers musulmans et de repousser les doctrines trompeuses que les nova- leurs avaient émises. Ceux-ci prétendaient' que, pour constater la vérité des dogmes, on n'avait besoin que de preuves fournies par la raison, et cela après avoir reconnu que la vérité de ces dogmes était déjà établie par des preuves tirées de la foi, preuves qui avaient porté les anciens musulmans à les accueillir et à y croire.

Il y a donc une grande différence entre les deux systèmes. En effet, les perceptions recueillies par le législateur inspiré appartiennent à une sphère si vaste qu'elles l'emportent de beaucoup sur celles que les spéculations de la raison peuvent nous fournir; elles leur sont bien supérieures et les embrassent toutes, parce qu'elles se puisent dans les lumières de la divinité. Donc elles ne se laissent pas soumettre P. 1 33 à une règle aussi étroite que celle de la spéculation, ni classer parmi les perceptions que tous les hommes peuvent obtenir. Aussi, quand le législateur nous a dirigés vers une perception (ou croyance), nous devons la préférer aux perceptions que nous avons recueillies nous- mêmes, et nous y fier à leur exclusion; nous ne devons pas chercher à en démontrer la vérité au moyen de la raison ni (à la concilier avec la raison) quand celle-ci la repousse. Au contraire, nous devons croire avec une foi sincère à ce que le législateur nous a prescrit, admettre ses doctrines comme des connaissances certaines, nous abstenir de parler au sujet de dogmes que nous ne comprenons pas, nous en rapporter (pour leur vérité) au sentiment du législateur et mettre la raison de côté.

Ce qui porta les scolastiques à faire autrement, ce furent les nou- veautés spéculatives, émises par des gens impies dans les discours

' Pour (j^^xyj , lisez 'j**) avec les manuscrits C et D et l'édition de Boulac. Prolégomènes. — m. . jj

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