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p. 73. croyaient aussi à l'établissement et à la divinité de leurs imams, doc- trines ignorées des premiers (Ismaéliens).

Chacune de ces sectes puisa des notions dans les doctrines de l'autre, d'où résulta un mélange d'opinions et une assimilation de croyances. Ce fut alors que commença dans les discours des Soufis l'emploi du terme cotb (axe), servant à désigner le chef des connais- sants (initiés à la vie spirituelle). «Aussi longtemps, disent-ils, que ce personnage vit, il reste sans égal dans la connaissance (du monde spirituel), et, quand il quitte le monde pour paraître devant Dieu, il laisse en héritage, à un autre individu des gens de la connaissance, la station qu'il occupait. » Ibn Sîna [Avicenne) fait allusion à cette opinion dans un des chapitres de son Kitab el-Icharat ^ qu'il a consacrés au sou- fisme : « La majesté de la vérité (c'est-à-dire de Dieu) est trop exaltée pour servir d'abreuvoir à tous les passants; on ne doit y arriver que l'un après l'autre. » En effet, cette opinion ne s'appuie sur aucune preuve tirée de la raison ou de la loi divine; elle n'est en réalité qu'une simple figure de rhétorique. Au reste, c'est la même doctrine que professent les Rafedites au sujet de leurs imams, dont l'un, selon eux, doit hériter de l'autre. Voyez comment ces gens-là (les Soufis) se sont laissé porter par leur disposition naturelle à dérober des opinions aux Rafedites et à s'en faire des articles de foi. Ils affirment aussi l'exis- tence des abdals -, placés à la suite du cotb. Cette doctrine est iden- tique avec celle des Chîïtes au sujet des nakîbs^. Ils sont allés si loin dans celte voie, qu'après avoir posé comme règle fondamentale de leur ordre et de leur communion l'obligation de porter la guenille (ou froc qui distingue maintenant les professeurs) du soufisme, ils ont fait remonter cet usage jusqu'à Ali. C'est encore là une opinion du

' Le Kitab el-lckarat oaa't-tenbihat (li- J. C.j. La vie d'Avicenne se trouve clans

vre d'indicalions et d'avertissements], Ibn Kliallikan, tome I de ma traduction ,

petit manuel de logfque et de métaphy- page 44o. sique composé par le célèbre Avicenne, ' Voy. la a* partie, p. 168.

a eu un grand nombre de commentai- ' /61W. p. 191.

pes. L'auteur mourut l'an 4a8 (1087 de

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