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352 PROLÉGOMÈNES

rent pas s'empêcher de lui demander le motif de ce singulier choix. Il répondit : « Puisque tous les genres de contributions (à l'exception de l'impôt foncier, de la dîme et de la capitation) sont illégaux, je choisis celui qui ne laisse pas de regret dans l'esprit de ceux qui l'ac- quittent. Il est bien rare qu'on ne soit pas gai et de bonne humeur après avoir donné son argent pour du vin, vu la jouissance ' que cette liqueur procure; on ne regrette pas ce qu'on a dépensé et l'on n'y pense plus. » C'était là une considération tout à fait originale.

p. 3oi. Le vil prix d'une marchandise nuit aux inlérêls de ceux qui, par mélier, s'occupent

de celte (espèce de marchandise) dépréciée.

Ce qui procure le gain et fournit les moyens de vivre , ce sont les métiers et le commerce, ainsi que nous l'avons dit. Le commerce consiste à acheter des denrées et des marchandises, et à les emma- gasiner jusqu'à ce que leur prix augmente au marché. Cela s'appelle bénéficier, opération qui fait toujours gagner aux commerçants et leur procure la subsistance. Si une denrée ou marchandise quelcon- que, que ce soient des comestibles, des habillements ou toute autre chose de valeur, reste entre les mains d'un négociant sans augmenter de prix sur le marché, plus ce retard sera long, moins il y aura de bénéfice pour lui, et moins il ajoutera à son capital. Tant que cette marchandise est peu recherchée, le négociant, voyant ses peines per- dues, ne s'occupe plus de son affaire et se trouve obhgé d'entamer son capital. Voyez, par exemple, ce qui arrive quand les grains res- tent longtemps à bas prix : les individus qui s'adonnent à l'agriculture et aux autres métiers qui dépendent de la production des grains souffrent dans leur fortune; ils gagnent peu ou rien, et ne voient pas augmenter leur capital, ou bien, trouvant leurs profits insuffisants, ils prennent l'habitude d'emprunter à leur capital afin de pourvoir à leurs dépenses. Cela aggrave leur position et les, réduit enfin à l'in- digence. La même dépréciation fait ensuite du tort aux meuniers,

' Pour <jl ocfcO , je lis «ùttv^.^, avec l'édition de Boulac.

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