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grands dangers. 11 en est autrement dans les plaines; s'il n'y a pas de troupë's pour les garder, et si le gouvernement établi montre de la faiblesse, elles deviennent la proie des Arabes, la curée dont ils se repaissent. Ces nomades y renouvellent leurs incursions, et, comme ils peuvent en parcourir toute l'étendue très-facilement, ils s'y livrent au pillage et aux actes de dévastation, jusqu'à ce que les habitants se résignent à les accepter pour maîtres. La possession de ces malheu- reuses contrées passe ensuite d'une tribu à une autre ; tout s'y désor- ganise, et la civilisation en disparaît tout à fait. Dieu seul a du pou- voir sur ses créatures.

Tout pays conquis par les Arabes est bientôt ruiné.

Les habitudes et les usages de la vie nomade ont fait des Arabes un peuple rude' et farouche. La grossièreté des mœurs est devenue pour eux une seconde nature, un état dans lequel ils se complaisent, parce qu'il leur assure la liberté et l'indépendance. Une telle disposi- tion s'oppose au progrès de la civilisation. Se transporter de lieu en lieu, parcourir les déserts, voilà, depuis les temps les plus reculés, leur principale occupation. Autant la vie sédentaire est favorable au progrès de la civilisation, autant la vie nomade lui est contraire. Si les Arabes ont besoin de pierres pour servir d'appuis à leurs mar- mites, ils dégradent les bâtiments afin de se les procurer; s'il leur faut du bois pour en faire des piquets ou des soutiens de tente, ils dé- P. 271. truisent les toits des maisons pour en avoir. Par la nature même de leur vie, ils sont hostiles à tout ce qui est édifice; or, construire des édifices, c'est faire le premier pas dans la civilisation. Tels sont les Arabes nomades en général; ajoutons que, par leur disposition naturelle , ils sont toujours prêts à enlever de force le bien d'autrui , à chercher les richesses les armes à la main ' et à piller sans mesure et sans retenue. Toutes les fois qu'ils jettent leurs regards sur un beau troupeau, sur un objet d'ameublement, sur un ustensile quel- conque, ils l'enlèvent de force. Si, par la conquête d'une province Littéral. « à l'ombre de leurs lances. •

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