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D'IBN KHALDOUN. 63

tribus qui étaient au service de l'empire, soit au corps des clients attachés à la maison du souverain. Les cadis remplissaient alors les mêmes fonctions que, de nos jours, on confie aux vizirs dans le Maghreb : ils sortaient à la tête des armées pour faire les campagnes P- 49- d'été, et ils avaient la direction des affaires les plus importantes, affaires qui ne se confient qu'à des hommes auxquels la puissance de leur famille donne les moyens d'exécution. Ceux qui entendent parler de ces faits tombent souvent dans l'erreur, parce qu'ils assi- milent un ordre de choses à un autre qui en difiFère.

Ce genre de méprise est très-commun de nos jours, surtout parmi ' les (musulmans) espagnols peu éclairés. Cela tient à l'extinction de tout esprit de corps chez eux, changement amené, il y a plusieurs siècles, par la ruine de la puissance arabe dans ce pays et par la chute de la dynastie qu'elle y avait fondée. Délivrés de la domina- tion des Berbers^, peuples chez lesquels a toujours existé un vif sentiment de nationalité, ces Arabes ont perdu l'esprit de corps et d'assistance mutuelle qui mène à la puissance, et ne conservent que leurs généalogies. Tombés au rang des peuples soumis qui ne se prêtent aucun secours les uns aux autres, subjugués par la force, abreuvés d'humiliations, ils s'imaginent qu'avec de la naissance et un emploi dans le gouvernement, on parvient facilement à conquérir un royaume et à gouverner les hommes. Vous trouverez, chez eux , jus- qu'aux hommes de métier et aux simples artisans qui rêvent le pou- voir et qui cherchent à le saisir. Celui qui a vu de près l'état des tribus dans le Maghreb, l'esprit de corps qui les anime, les empires qu'elles ont fondés et la manière dont ces peuples et ces tribus établis- sent leur domination, ne se laisse guère tomber dans de pareilles erreurs et se trompe rarement dans l'appréciation de ces matières.

' Avant le mot J*l , il faut insérer la habitaient la chaîne de l'Atlas marocain;

préposition ^. les premiers faisaient partie des Lemtouna

' C'est-à-dire, les Almoravides et leurs et d'autres tribus berbères qui habitaient

successeu rs, les Almohades. Ceux-ci appar- le grand désert, entre le Sénégal et Ten-

tenaient aux tribus masmoudiennes qui boktou.

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