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HISTOIRE DES BERBÈRES.

temps après, Ahmed-ibn-Mekki, et son pupille, devenu maître de ses actions, gouverna d’une manière tyrannique jusqu’à l’an 772 (1370), quand il fut bloqué dans sa capitale par la flotte d'Abou-Bekr-Ibn-Mohammed-Ibn-Thabet. Secondé par les Arabes et les Berbères de la province, Ibn-Thabet attaqua Tripoli au moment où les habitants venaient de s'insurger contre leur gouverneur, et y pénétra de vive force. Abd-er-Rahman se réfugia chez un chef debbabien et resta dans cet asile jusqu’à ce que son protecteur pût le faire conduire en lieu de sûreté. Arrivé à Cabes, berceau de sa famille et siège du gouvernement de son oncle, Abd-el-Mélek, le fugitif y passa le reste de ses jours et mourut en l'an 779 (1377-8). Aujourd’hui, en 781 (1379-80), Abd-el-Mélek continue à gouverner la ville de Cabes. Son fils Yahya lui sert de vizir, et son petit-fils, Abd-el-Ouehhab-Ibn-Mekki remplit [auprès de Yahya] les fonctions de lieutenant. La position des Mekki est bien changée : Tripoli, Djerba, Sfax et les autres endroits qui faisaient partie des états d’Ahmed-Ibn-Mekki leur ont échappé. On peut dire que le bonheur et la prospérité de cette maison avaient dépendu de l’existence de ce chef. Les deux, frères, Ahmed-Ibn-Mekki et Abd-el-Mélek-lbn-Mekki ont toujours tenu une conduite juste et louable, ne s’étant jamais écartés des voies de la bienfaisance et de l’équité. Ornés de toutes les qualités qui marquent l’homme religieux, ils se plaisaient à porter l’habillement des docteurs de la loi, circonstance qui leur procura le titre de fukîk (légiste), et ils se distinguaient des autres chefs de l’époque par leur progrès dans le sentier de la vertu. Ahmed possédait un beau talent littéraire et composait de jolis vers. Dans le genre épistolaire, il déployait une grande élégance de style, auquel sa belle écriture donnait un nouveau charme. Quand il écrivait, il traçait et combinait les lettres d’après le système caligraphique suivi en Orient. Son frère, Abd-el-Mélek, possédait des talents semblables et, dans ces genres de mérite, il rivalisait avec les hommes les plus habiles de son temps et de son pays. Quand le sultan Abou-’l-Abbas se fut rendu maître, de