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L
INTRODUCTION.

mort d’Abd-el-Azîz et l’avènement d’un jeune enfant, fils de celui-ci, lui accorda un traitement et des icta tels qu’il ne s’y attendait pas. Outre ces faveurs, Ibn-Khaldoun conserva le rang qu’il tenait à la cour et il obtint une place d’honneur aux audiences du sultan.

Après l’avènement d’Abou-Bekr-es-Saîd, fils du feu sultan Abd-el-Azîz, deux autres princes de la famille royale mérinide se présentèrent simultanément sous les murs de la Ville-Neuve[1] avec l’intention de s’emparer du trône. L’émir Abd-er-Rahman, surnommé Ibn-Abi-Ifelloucen, et l’émir Abou-’l-Abbas réunirent leurs efforts afin de réduire cette forteresse après avoir pris l’engagement mutuel de se partager les états de l’empire mérinide. Le vizir Ibn-Ghazi fut contraint à se rendre, et Abou-’l-Abbas prit possession de la capitale et des provinces situées au nord de l’Omm-Rebiâ, laissant à son parent, Abd-er-Rahman, le soin d’occuper et de gouverner la ville de Maroc et les contrées qui en dépendent. Comme Ibn-Khaldoun avait su gagner la faveur d’Abd-er-Rahman, l’autre sultan en prit ombrage et le fit emprisonner ; mais, au bout de trois jours, il consentit à le relâcher sur les instances de son allié. Peu rassuré sur l’état des affaires, Ibn-Khaldoun obtint alors l’autorisation de passer en Espagne. Ce fut en l’an 776 (août-sept. 1374), qu’il se présenta de nouveau à la cour d’Ibn-el-Ahmer. Accueilli, d’abord, avec bienveillance, il encourut bientôt la haine du sultan qui, trompé par les faux rapports que lui adressait le cabinet de Fez, ordonna l’arrestation de son hôte et le fit déporter à Honein, ville maritime du royaume de Tlemcen. Le sultan Abou-Hammou s’étant alors souvenu de la défaite qu’il avait essuyée dans le Zab et de la part active qu’Ibn-Khaldoun y avait prise, vit de très mauvais œil la présence de son ancien serviteur et ennemi sur le sol de ses états. Un des nombreux amis qu’Ibn-Khaldoun avait toujours eu la prévoyance de se ménager pendant ses missions diplomatiques, intercéda pour lui et le fit appeler à Tlemcen.

Arrivé dans cette ville, il alla demeurer avec une société de

  1. Voy. ce nom dans l’index géographique.