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EN-NOWEIRI.

Plus loin, notre historien dit : Ahmed concentra en lui-même toute l’autorité, et choisit Nasr-Ibn-Hamza-el-Djeraoui pour vizir. Cette nomination déplut à Dawoud-Ibn-Hamza-er-Raderi, qui se croyait en droit de prétendre à ce poste, parce qu’il avait été le chef et le directeur de la conspiration. Cédant au désir de se venger, Dawoud se mit à comploter contre Ahmed, et entama une correspondance avec Mohammed qui, depuis quelque temps, avait renoncé aux plaisirs pour tramer la perte de son frère. Salem, fils de Ghalboun et gouverneur du Zab, tenait d’Ahmed sa nomination, mais au moment où il l’eut vu s’emparer du pouvoir, il cessa de reconnaître son autorité. Ce fut dans ces circonstances que Mohammed mit son projet en exécution. Il avait sondé les principaux membres de sa famille, les chefs de la milice et jusqu’à ses propres esclaves ; leur promettant de fortes récompenses s’ils voulaient l’appuyer, et les encourageant de l’espoir d’un succès assuré. Au nombre de ses partisans, celui qui montra le plus d’habileté et qui organisa tout le complot, fut Ahmed-Ibn-Sofyan-Ibn-Souada ; mais malgré ses précautions, le bruit parvint à Ahmed que son frère Mohammed travaillait à le perdre. Il n’en voulut cependant rien croire, se flattant que sa prévoyance le mettait à l’abri de tout danger. [De son côté Mohammed se conduisit avec beaucoup d’adresse ;] quand un messager lui venait de la part d’Ahmed, il se faisait apporter une grande coupe remplie de vin, avant d’admettre l’envoyé qui, en le trouvant ainsi la coupe à la main, se figurait que le prince ne s’occupait qu’à boire ; mais aussitôt que cet homme s’en allait, Mohammed renvoyait le vin sans y toucher. Au jour fixé pour l’exécution du projet, Mohammed appela Ahmed-Ibn-Sofyan auprès de lui, pendant que plusieurs de ses esclaves et affranchis pénétraient déguisés dans la forteresse, tous portant sur la tête des cruches d’eau. Vers le soir, trois cents hommes se trouvèrent réunis, et Ibn-Sofyan les conduisit chez lui pour leur distribuer de l’argent et des armes. Dans ce moment on vint encore prévenir Ahmed qu’on en voulait à ses jours et que son frère complotait contre lui, mais il entra en colère et maltraita le messager. Il avait pris les anciennes habitudes de son frère, et ne s’occupait qu’à


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