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APPENDICE.

tinrent dans un état satisfaisant tant qu’il gouverna la province. Il mourut dans l’exercice de ses fonctions, le 19 Ramadan 174 (janvier 791)[1].

§ XXXII. — GOUVERNEMENT DE NASR, FILS DE HABÎB, MEMBRE DE LA FAMILLE D’EL-MOHELLEB.

L’historien rapporte qu’à cause de sa vieillesse et de sa décrépitude, Rouh-Ibn-Hatem avait l’habitude de s’abandonner au sommeil pendant les audiences publiques qu’il présidait. Cette circonstance porta le maître de la poste aux chevaux et le caïd Abou-’l-Anber à écrire au khalife Er-Rechîd pour l’informer de l’état du gouverneur[2], et lui exprimer la crainte que leur inspirait l’éventualité de sa mort : « Cet événement, disaient-ils, peut arriver d’un jour à l’autre, et comme la province forme une des frontières de l’empire, elle ne saurait se maintenir sans un chef d’une grande énergie. » Dans la même lettre, ils vantèrent la sagesse de Nasr-Ibn-Habîb et sa haute capacité administrative ; ils parlèrent aussi de sa popularité, et proposèrent au Chef des croyants de le nommer secrètement à la place de Rouh, afin qu’il pût agir comme gouverneur provisoire, dans le cas où quelque malheur atteindrait celui-ci. Cette recommandation décida Er-Rechîd à choisir Nasr pour gouverneur et à expédier secrètement le diplôme de sa nomination. A la mort de Rouh, la grande mosquée fut tendue de tapisseries pour l’inauguration de son fils Cabîça qui devait y tenir une séance et recevoir du peuple assemblé le serment de fidélité. Pendant que cette cérémonie s’ac-

  1. Rouh-Ibn-Hatem avait rempli de très-hauts emplois sous les Abbacides : d’abord chambellan d’El-Mansour, il passa au gouvernement de Koufa et Basra, et ensuite à ceux du Sind, de Taberistan, de la Palestine, etc. Un jour, il attendait au grand soleil, devant la porte du palais, afin de faire sa cour au khalife. Un passant lui dit : « Voilà longtemps que vous vous tenez au soleil. » — « Oui, répondit-il, mais c’est afin de pouvoir rester longtemps à l’ombre » — (Baïan.)
  2. Les maîtres de postes comptaient parmi leurs attributions le droit de correspondre directement avec le khalife, pour le tenir au courant de tout ce qui se passait dans leurs provinces respectives.