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EN-NOWEIRI.

ville de Tobna[1], un acte par lequel il le constituait gouverneur de l’Ifrîkïa. Dans le mois de Djomada second de l’an 148, El-Aghleb se rendit à Cairouan d’où il expulsa Eïça-Ibn-Mouça ainsi que plusieurs chefs moderites, et fit tout rentrer dans l’ordre. Plus tard Abou-Corra se révolta, à la tête d’une multitude de Berbères, mais il prit la fuite en apprenant qu’El-Aghleb s’était mis en marche avec tous ses généraux pour l’aller combattre. El-Aghleb pénétra alors dans le Zab et voulut même pousser jusqu’à Tlemcen et à Tanger ; mais ses troupes, ne s’accommodant pas d’une telle entreprise, le quittèrent pendant la nuit, et prirent la route de Cairouan ; de sorte qu’il ne lui resta plus qu’un petit nombre d’officiers. Sur ces entrefaites, El-Hacen-Ibn-Harb-el-Kindi[2], qui se trouvait à Tunis lors de l’expédition contre Abou-Corra, écrivit à plusieurs chefs sous les ordres d’El-Aghleb [dans l’espoir de les séduire]. Un certain nombre de ceux qui avaient abandonné leur chef dans le Zab vinrent se joindre à El-Hacen qui, se voyant soutenu par Bistam-Ibn-el-Hodeil, El-Fadl-Ibn-Mohammed et d’autres chefs, marcha sur Cairouan et l’occupa sans éprouver la moindre résistance. Il fit aussitôt emprisonner Salem-Ibn-Souada de la tribu de Temîm, qui commandait la ville en l’absence d’El-Aghleb. Celui-ci se porta aussitôt sur Cairouan avec le petit nombre de troupes qui lui était resté fidèle, et il écrivit, en même temps, à El-Hacen pour lui exposer les avantages de l’obéissance et les dangers de l’insoumission. A cette lettre il reçut une réponse qui se terminait par ces vers :

Porte à El-Aghleb, de la part de Hacen, une parole qui retentira au loin.

Dis-lui que le champ de la tyrannie offre un pâturage malsain, et malheur à lui s’il ose s’en approcher !

S’il refuse de me demander la paix, qu’il vienne affronter ma lance et mon épée !

  1. Ibn-el-Achâth avait confié à El-Aghleb le gouvernement du Zab et de la ville de Tobna. — (Ibn-Khaldoun.)
  2. Le surnom d’El-Kindi montre que cet officier appartenait à la grande famille des Arabes yéménites, ennemis héréditaires des Arabes sortis de la souche de Moder.