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LES BENI-ABI-’L-AFÏA. — MIKNAÇA.

Dès ce moment, Ibn-Abi-’l-Afïa devint tout puissant en Maghreb.

En l’an 313 (925-6), El-Hacen, fils de Mohammed-Ibn-el-Cacem-Ibn-Idrîs, prince d’une bravoure extraordinaire et surnommé El-Haddjam (le phlébotomiste), parce qu’il frappait toujours ses adversaires dans la veine du bras, réussit à surprendre la ville de Fez, à en tuer le gouverneur, Rîhan, et à s’y faire reconnaître comme souverain. Ibn-Abi-’l-Afïa entreprit de la combattre, mais il perdit son fils, Minhal-Ibn-Mouça, et deux mille de ses Miknaciens dans une bataille qui eut lieu à Ouadi-’l-Matahen (rivière des moulins), dans la plaine d’Addad, entre Téza et Fez. A la suite d’une nouvelle rencontre, El-Haddjam subit une défaite, et rentra à Fez avec les débris de son armée. Il y succomba, victime d’une trahison indigne : Hamed-Ibn-Hamdan-el-Hemdani[1], l’officier auquel il avait confié le commandement du quartier des Cairouanites, le jeta dans les fers et livra ensuite [cette partie de] la ville à Ibn-Abi-’l-Afïa. Ce chef, qui était accouru en toute hâte sur l’invitation de Hamed, tourna aussitôt ses armes contre le quartier des Andalous et s’en empara. Abd-Allah-Ibn-Thâleba-Ibn-Mohareb-Ibn-Aboud, gouverneur de cette moitié de la ville, y trouva la mort.

La vainqueur donna à Mohammed-Ibn-Thâleba, frère d’Abd-Allah, le commandement du quartier des Andalous et somma Hamed-Ibn-Hamdan de lui livrer El-Haddjam. Cet homme ressentit une telle répugnance à laisser verser le sang d’un rejeton du Prophète, qu’il fit évader son prisonnier. El-Haddjam tâcha alors de descendre du haut de la muraille au moyen d’une corde, mais ayant eu le malheur de se laisser tomber, il se cassa la jambe et mourut trois jours après, dans le quartier des Andalous où ses amis l’avaient transporté secrètement. Hamed lui-même dut se retirer à El-Mehdïa pour éviter la colère d’Ibn-Abi-’l-Afïa.

Maître de Fez et du Maghreb entier, Ibn-Abi-’l-Afïa força les

  1. L’auteur du Cartas ajoute que cet homme appartenait à la tribu berbère des Auréba.