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LES KOUMÏA — BENI-FATEN.

il avait déployé des connaissances qui lui méritèrent le rang de docteur dans cette secte. Ce fut même par lui que les principes achariens furent introduits en Maghreb. Les jeunes gens qui étudiaient la loi à Tlemcen souhaitaient avec ardeur les enseignements d’un tel maître, et dans leurs entretiens, ils se disaient les uns aux autres : « vous devriez bien aller trouver ce docteur, et tâcher de l’attirer à Tlemcen par la perspective des mérites qu’il pourra acquérir en communiquant ses lumières aux habitants d’une localité aussi importante. » Poussés par les sollicitations de ses condisciples, par l’ardeur de la jeunesse et par cet amour des voyages que l’on contracte en vivant sous la tente, Abd-el-Moumen se chargea de leur commission et partit pour Bougie. Il trouva Ibn-Toumert à Melala où il s’était retiré pour jouir de la protection des Beni-Ourîagol et éviter la poursuite d’El-Aziz, seigneur de Bougie. Ibn-Toumert lut avec un vif intérêt l’invitation écrite que lui envoyèrent les étudiants de Tlemcen, mais il avait alors en vue des projets qui l’empêchèrent d’y répondre. Alors Abd-el-Moumen s’attacha à lui, le suivant partout et mettant à profit ses enseignements. Pendant leur voyage vers le Maghreb, il fit un tel progrès dans l’étude et montra tant d’intelligence et d’aptitude que son maître le traita avec une bonté toujours croissante et finit par l’adopter comme ami et élève favori. Pour l’encourager encore davantage, il lui adressa ces paroles : « je reconnais aux traits de ta figure que tu deviendras un jour mon lieutenant. » La route qui les conduisit en Maghreb les mena vers les environs de Médéa. Ils y trouvèrent les Thâleba, tribu dont il a déjà été question[1]. Ces Arabes offrirent à Ibn-Toumert un âne fort et vigoureux pour lui servir de monture, mais ce docteur le céda à Abd-el-

    la prédestination. On pourra aussi consulter la traduction allemande de l’ouvrage de Chehrestani sur les sectes islamiques et les écoles philosophiques. Ce volume est intitulé Schahrastani’s Religionspartheien und Philosophenschulen. Le traducteur, Theodor Haarbrücker, a pris pour base de son travail la belle édition du texte arabe de Chehrestani, publiée à Londres par le docteur Cureton.

  1. Voyez ci-devant, page 422 et suivantes.