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HISTOIRE DES BERBÈRES

Les Ourfeddjouma se partagent en un très-grand nombre de tribus dont l’une, appelée les Zeggoula [ou Zeddjala], s’adonna à la vie nomade et tira son origine de Zeggal, fils d’Ourfeddjoum. Les Ourfeddjouma formaient la portion la plus nombreuse et la plus puissante de la tribu de Nefzaoua. Quand Abd-er-Rahman- Ibn-Habib se révolta contre Abou-Djafer-el-Mansour, ses frères Abd-el-Ouareth et El-Yas lui ôtèrent la vie et tachèrent ensuite d’échapper à la poursuite de leur neveu Habib qui cherchait à venger la mort de son père. Abd-el-Ouareth se réfugia dans le Mont-Auras, chez les Ourfeddjouma, et obtint la protection d’Acem-Ibn-Djemil, émir de ce peuple et devint très-habile. Acem fit proclamer l’autorité d’Abou-Djafer-el-Mansour, rallia autour de lui les populations nefzaouïennes, et marcha contre Cairouan. Ce fut en l’an 140 (757-8) qu’il entreprit cette expédition. Les Nefzaoua professaient alors la doctrine eibadite[1] et comptaient parmi leurs guerriers les plus distingués Abd-el-Mélek-Ibn-Abi-’l-Djad et Yezid-Ibn-Seggoum. À l’approche de cette armée, Habib, fils d’Abd-er-Rahman, s’enfuit de Cairouan. Ibn- Abi-’l-Djad pénétra dans cette ville et [plus tard il] tua Habib. Les Nefzaoua, devenus maîtres de Cairouan, massacrèrent tous les Coreichides et tous les autres Arabes qui y étaient restés ; ils attachèrent leurs montures dans la grande mosquée et commirent tant d’autres forfaits et profanations qu’ils excitèrent l’indignation des Berbères-eibadites de Tripoli. Les Zenata et les Hoouara se mirent à la tête du mouvement, prirent pour chef Abou-’l- Khattab-Ibn-es-Sameh, arabe d’une haute distinction, et allèrent s’emparer de Tripoli ; puis, en l’an 144, ils occupèrent Cairouan, tuèrent Ibn-Abi-’l-Djad et passèrent au fil de l’épée les Nefzaoua et les Ourfeddjouma qui composaient son armée. Ils repartirent ensuite pour Tripoli, après qu’Abou-’l-Khattab eut confié le gouvernement de Cairouan à Abd-er-Rahman-Ibn-Rostem. Le ſou de la guerre se propagea dans tout le Maghreb, et les Ourfeddjouma y poursuivirent le cours de leurs dévastations jusqu’à l’an 146 (763-4), quand Mohammed-Ibn-el-Achath y

  1. Voyez ci-devant, page 204, note.