Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
28
HISTOIRE DES BERBÈRES.

de s’y fixer. Il est vrai qu’Ifrîcos-Ibn-Saïfi, ce prince de la dynastie des Tobba [rois du Yémen], qui donna son nom à l’Ifrîkïa, y avait conduit une expédition et s’en était rendu maître ; mais, après y avoir laissé les tribus himyerites de Ketama et de Sanhadja, il s’en alla. Ces deux peuples devinrent graduellement Berbères et se confondirent avec cette race, de sorte que l’autorité des Arabes en Ifrîkïa disparut tout-à-fait.

Lors de la promulgation de l’Islamisme, le progrès de cette religion mit les Arabes en état de vaincre les autres nations. Leurs armées pénétrèrent dans le Maghreb et prirent toutes les villes de ce pays. Ils eurent alors beaucoup à souffrir dans leurs guerres contre les Berbères, qui, comme nous l’avons rapporté ailleurs, sur l’autorité d’Ibn-Abi-Yezîd[1], apostasièrent jusqu’à douze fois avant que la vraie religion eût pris racine chez eux. Aussi, les Arabes ne s’y établirent point comme habitans de tentes et comme tribus nomades : le besoin d’assurer leur domination dans ce pays les ayant obligés à se tenir dans les villes.

Ainsi, comme nous venons de le dire, les Arabes n’avaient pas habité les plaines du Maghreb ; ce ne fut qu’au milieu du cinquième siècle qu’ils vinrent y faire leur demeure et se disperser par tribus, pour aller camper dans toutes les parties de cette vaste région.

Nous allons maintenant exposer en détail les causes de cette migration.

LES TRIBUS DE HILAL ET DE SOLEIM, ARABES DE LA QUATRIÈME RACE, ENTRENT EN AFRIQUE. — SUITES DE CET ÉVÉNEMENT.

Depuis l’avènement de la dynastie abbacide, les tribus formant les deux grandes familles moderites de Hilal et de Soleim avaient continué à vivre en nomades et à parcourir avec leurs troupeaux, les déserts du Hidjaz qui touchent à la province du

  1. Abou-Mohammed-Aïoub, fils de l’Abou-Yezîd qui fit une guerre si acharnée à la dynastie des Fatemides, était très-versé dans la connaissance des généalogies berbères. Il demeura pendant quelque temps à la cour de Cordoue, auprès du célèbre ministre El-Mansour. L’histoire d’Abou-Yezîd se trouve dans cet ouvrage.