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passion de gain ; dans les décors variés des âges, le Veau d’or s’érigeait, immuable et il régnait. Alors, ivre de douleur, Jésus sua le sang et cria : Père si vous vouliez détourner de moi ce calice ; puis il ajouta, résigné, cependant que votre volonté se fasse et pas la mienne !

…Cependant le paroxysme de ses souffrances n’était pas atteint ; il ne le fut que sur la Croix ; sans doute, son supplice physique fut horrible, mais combien il semble indolore si on le confronte avec l’autre ! Car, sur le gibet, ce fut l’assaut de toutes les immondices réunies des temps ; les gémonies du passé, du présent, de l’avenir, se fondirent et se concentrèrent en une sorte d’essence corrosive ignoble et elles l’inondèrent ; ce fut quelque chose comme un charnier des cœurs, comme une peste des âmes qui se ruèrent sur le bois pour l’infecter. — Oh ! ce calice qu’il avait accepté de boire, il empoisonnait l’air ! — Les anges qui avaient assisté le Seigneur au Jardin des Olives n’intervenaient plus ; ils pleuraient