Dans cette retraite et plus tard dans ses paisibles logements de la rue de Babylone et de la rue Saint-Placide, il nous apparaît comme un reclus, au milieu de la société contemporaine. Homme d’un autre âge, artiste gothique, sollicité néanmoins par le charme étrange de l’art moderne, les horions qu’il assène sans relâche aux archéologues ignares, aux curés iconoclastes — ou restaurateurs, ce qui est pire ! — ne sont que les révoltes impulsives de son goût outragé. Passé cela, il se confine dans une piété faite de tendresse et de naïveté. Il a une foi d’enfant et, sans discuter un instant avec le surnaturel, il va droit aux miracles les plus extraordinaires de la Légende Dorée. Il les reçoit avidement et il les révère, tels les signes ingénus de sa religion.
Comment un critique, armé à l’ordinaire d’un solide bon sens, a-t-il pu prétendre jadis que Huysmans s’était converti afin de « ragaillardir son sensualisme défaillant » ? Tout démontre, au contraire, qu’à partir de sa conversion, son sensualisme s’évanouit. Croit-on que sa marche vers le cloître lui ait réservé beaucoup de jouissances ? Croit-on qu’il ne lui ait pas fallu vaincre des répulsions instinctives pour affronter les austérités de la pénitence ? car il ne s’est pas jeté dans une trappe après avoir été foudroyé sur le chemin de Damas ; on a dû l’y pousser « comme un chien qu’on fouette » !
Et puis quinze ans de vie chrétienne, de 1892