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inquiet, dont la jeunesse fut besogneuse et qui, n’ayant jamais eu beaucoup de chance ici-bas, se méfie des pauvres satisfactions que la vie pourrait lui offrir. Avec cela, privé de toute affection terrestre, mais doué d’une sensibilité maladive qui lui arrache des cris de souffrance à la moindre indélicatesse ; très artiste, mais constamment affligé par le spectacle des grossières réclames industrielles que lancent les peintres et les écrivains ; réduisant sa bibliothèque à « une cinquantaine de volumes qu’il savait par cœur » ; ne se résignant pas à voir Paris se transformer en « un Chicago sinistre » et s’attachant désespérément aux moindres vestiges de beauté avant « la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau-Monde ».

On comprend que de telles dispositions aient déterminé chez lui des goûts de solitude qui s’affirmeront d’année en année et qui, surtout après sa conversion, l’amèneront à fuir la société des personnages dont il aura scruté l’indigence morale.

Notons aussi que sa misanthropie foncière ne devait que s’exaspérer à l’école du naturalisme.

Il avait écrit Marthe, les sœurs Vatard, En ménage, qui sont des études cruelles, impitoyables, voire écœurantes de tout ce que la vie renferme de lugubre et d’abject. Il reconnaissait l’impuissance de son art à descendre plus bas, à « touiller » des fanges plus nauséabondes. Il