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son fût, revint en arrière, rentra dans un café, se fit servir un bitter, relut les journaux qu’il connaissait et repartit. Il fut heureux de rencontrer, à la hauteur de la rue Vivienne, un ami qu’il évitait d’ordinaire ; il lui offrit l’absinthe et quand l’aiguille marqua six heures, il le quitta précipitamment.

Le moment approchait où il devait revoir Marthe. Il avait mal dîné, sans appétit et sans soif ; il courut à la rue de Fleurus et se rendit au foyer où étaient rassemblés tous les acteurs.

C’était jour de première. Ginginet était ce soir-là plus grincheux et plus bougon que de coutume. Ses gambilles se désossaient, disait-il, en se tapotant les jambes. D’ailleurs, il crevait de dépit, il venait de perdre trois manches au bezigue et la quatrième était bien compromise, car Bourdeau, son partner, venait d’annoncer le 250, et comme il avait dans son jeu les deux as d’atout, il annihilait du même coup, pour son adversaire, tout espoir de revanche.

Ginginet grommelait, le nez sur ses cartes. Quarante de galapiats, hurla-t-il rageusement en jetant quatre valets sur la table ; et il se leva un instant pour aller voir au travers de l’œil du rideau la composition de la salle.