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des juges ! — La belle malice que de vous empaumer, vous autres ! Oh, c’est bien simple, va !

Et le touchant presque, elle lui tendit ses merveilleuses lèvres, éclatantes comme des pivoines et tout embrasées par la flamme blanche des dents.

Ginginet fut remué de fond en comble et il avança les bras.

— Bas les pattes, vieux ! dit-elle. Je joue la comédie, et c’est toi qui me l’as apprise. Ni vu, ni connu, je t’embrouille. Tout bien considéré, vois-tu, ta bedaine me choque avec son va-et-vient perpétuel ; tes joues pèlent, ton nez se truffe, ta figure ne me revient décidément plus. Bonsoir !

— Sais-tu une chose, Marthe ? dit Ginginet très-pâle, c’est que j’ai une furieuse envie de te giffler comme tu le mérites !

— Ah, par exemple ! toi me giffler ! n’approche pas, tu sais, ou je te brise cette carafe sur la tête !

Ginginet n’en attendit pas davantage ; il se rua sur elle, attrapa à la volée un coin du cristal qui lui bossua le crâne, mais il empoigna la fille par les mains et la jeta rudement sur le plancher.

Elle se releva meurtrie et elle le regarda avec plus d’étonnement que de colère.